La construction européenne n’a, pendant longtemps, que très peu affectait le droit de l’assurance-maladie et de la santé. Dans le traité de Rome instituant la Communauté économique européenne, l’article 48 a posé le principe de la libre circulation des travailleurs et l’article 51 a imposé l’adoption de règles de coordination des systèmes nationaux de sécurité sociale afin de faciliter cette mobilité géographique.
Désormais, l’article 3 du traité sur l’Union européenne dispose que l’Union : « combattent l’exclusion sociale et les discriminations, et promeut la justice et la protection sociales ».
Quant au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, il précise en son article 6 que « la protection et l’amélioration de la santé humaine» et un domaine ou « l’Union disposent d’une compétence pour mener des actions pour appuyer, coordonner ou compléter l’action des États membres ».
Toutefois, il résulte de son article 153 que les dispositions prises par l’Union en matière de politiques sociales ne doivent pas porter atteinte « à la faculté reconnue aux États membres de définir les principes fondamentaux de leur système de sécurité sociale et ne doivent pas en affecter sensiblement l’équilibre financier.
De même, l’article de l’Union est menée dans le respect des responsabilités des États membres en ce qui l’organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux. Les responsabilités des États membres incluent la gestion de services de santé et de soins médicaux, ainsi que l’allocation des ressources qui leur sont affectés.
Un règlement du 29 avril 2004 organise actuellement la coordination des systèmes de sécurité sociale, prévue par l’article 51 du traité. S’agissant de l’offre de soins, le droit communautaire a organisé la libre circulation des produits de santé, notamment des médicaments, puis celle des professionnels de santé avec les directives prévoyant la reconnaissance mutuelle des diplômes.
À partir des années 1980, la cour de justice des communautés européennes (CJCE), désormais cour de justice de l’Union européenne (CJUE), a été régulièrement appelée à se prononcer sur des questions relatives au droit de l’assurance-maladie. Elle estime, notamment depuis les arrêts Poucet et Pistre du 17 février 1993, qu’il appartient à chaque État de définir le droit ou l’obligation pour chacun d’être affilié à un régime de sécurité sociale et considère que les caisses de sécurité sociale, chargées de régime obligatoires, ne sont pas des entreprises au sens du traité de Rome et ne sont donc pas soumises aux règles de la concurrence communautaire.
La CJCE a également admis qu’un régime obligatoire pouvait être en situation de monopole dès lors notamment qu’il était soumis au contrôle de l’État et mettait en œuvre « le principe de solidarité ». La CJCE est également intervenue pour définir le droit au remboursement des soins dispensés à un assuré social dans un État autre que celui de sa résidence, indépendamment de toute activité professionnelle. Par les arrêts Kholl et Decker de 1998, elle a imposé la prise en charge par l’État de résidence des soins ambulatoires reçus dans un autre État.
En 2001, pour l’hôpital, elle a admis qu’il était loisible à un État de soumettre à autorisation préalable la prise en charge de soins dans un autre État afin de garantir le maintien dans chaque État d’une « offre suffisante, équilibrée et permanente de soins hospitaliers et de garantir la stabilité financière du système d’assurance-maladie ».
Toutefois, elle a précisé ultérieurement que l’autorisation ne pouvait être refusée que lorsqu’un « traitement identique, ou présentant le même degré d’efficacité pour le patient », pouvait être obtenu « en temps opportun » dans un établissement conventionné avec l’assurance-maladie dont relève le patient.
La cour a, en 2009, estimé, d’une manière générale, qu’un État pouvait planifier l’offre de santé sur son territoire, y compris le cas échéant pour les soins ambulatoires, et porter atteinte à la liberté d’établissements dès lors que cette qualification était nécessaire pour garantir la qualité et l’accessibilité du service médical offert à la population et prévenir tout risque d’atteinte grave a l’équilibre financier des régimes de protection sociale.
Une directive du 9 mars 2011 est venue codifier les règles issues de la jurisprudence de la CJUE. Elle constitue désormais le droit positif européen régissant le remboursement des soins reçus par un assuré social dans un État qui n’est pas celui de sa résidence. Elle pose également les bases de mécanismes communs visant à garantir la qualité et la sécurité des pratiques médicales.
La constitution européenne a ainsi cherché à concilier, depuis ses origines, les exigences de la libre circulation et du rapprochement des législations nationales et la possibilité pour chaque État d’organiser son système de santé et d’assurance-maladie dans le respect de son histoire, sa culture et son économie.